344 LES DIFFICULTES EN VUE DU CHOIX D'UN MODE DE SCRUTIN.

Publié le 15/08/2012 à 06:06 par cafenetphilosophie Tags : france cadre moi mode

      Philosophie au fil des jours.

        Rubrique "Institutions et liberté"

        Suite du billet N° 340. 
        Prochain billet sur ce thème mardi 20 août

 

     Lors de notre précédent billet sur ce thème, nous avions montré quelles étaient les caractéritiques du scrutin majoritaire en France pour les élections législatives et surtout quelle était sa logique interne et en quoi une modification visant à introduire une dose de proportionnelle pouvait conduire à rompre partiellement cette logique interne.

    Pourtant, la plupart des observateurs et des acteurs politiques, quelle que soit leur tendance, souhaitent une révision partielle de ce mode de scrutin afin de pallier  un de ces défauts majeurs, à savoir l'exclusion  de toute représentation pour des courants politiques ayant recueilli une part non négligeable des suffrages des électeurs.

   A vrai dire, il ne s'agit pas du seul défaut de ce mode de scrutin, rappelons-le, uninominal à deux tours dans le cadre de circonscriptions territoriales. Il y a bien entendu le problème toujours épineux du découpage des circonscriptions. Car réalisé non par une commission indépendante mais par une majorité politique en place, ce découpage tend souvent à favoriser globalement, même si ce n'est pas dans des proportions caricaturales, un camp au détriment d'un autre ou bien plus modestement telle ou telle personnalité politique afin de lui assurer une circonscription sociologiquement sûre. Cela aboutit parfois à des découpages artificiels ne respectant plus des limites  géographiques cohérentes.

  Ajoutons à cela que si ce mode de scrutin, comme son nom l'indique, vise à dégager une majorité pour  gouvener, il peut considérablement amplifier des mouvements d'opinion parfois ténus et aboutir à des "chambres dites introuvables" tant est large et non justifée dans l'absolu l'ampleur de leur majorité. 

   Dès lors, dans l'idéal, il conviendrait de concilier les logiques des deux principes électoraux principaux, à savoir le principe majoritaire et le principe proportionnel. Mais un simple compromis entre ces deux principes peut également ne pas être satisfaisant. Il faut absolument qu'un des deux principes soit déterminant et prenne clairement le dessus sur l'autre. Supposons par exemple que l'on choisisse de désigner la moitié des représentants selon un principe majoritaire et l'autre moitié selon un principe proportionnel et on peut aboutir à une situation artificielle ou inextricable où à la faveur de la représentation proportionnelle de groupes politiques absents de la représentation majoritaire, les tendances ayant obtenu la majorité des sièges dans cette moitié majoritaire se retrouvent néanmoins minoritaires sur l'ensemble des sièges à pourvoir. Dans ce cas, la volonté des électeurs de désigner telle ou telle formation politique ou telle ou telle coalition afin de gouverner le pays  n'est plus  respectée.

  Il est vrai qu'en France, depuis la réforme du mode de scrutin des élections municipales en 1982, la solution a semblé être trouvée.  En quoi consiste ce mode de scrutin? Si aucune liste n'obtient la majorité dès le premier tour, ne peuvent solliciter les suffrages des électeurs que les listes ayant obtenu 10% des suffrages lors du premier tour. La liste arrivée en tête obtient la moitié des sièges et participe à la répartition de la deuxième moitié des sièges à la proportionnelle du second tour. Dans ce contexte, de très larges majorités se dégagent tout en assurant une représentation à tous les courants politiques ayant obtenu au moins 10% des électeurs et même à ceux ayant obtenu entre 5 et 10% des voix puisque le mode de scrutin en question prévoit pour ces derniers des alliances possibles avec des formations ayant obtenu au moins 10% des voix.

   Si nous analysons de plus près ce mode de scrutin municipal, nous constatons qu'il n'est nullement un compromis entre les principes majoritaires et proportionnels car il obéit à une logique uniquement majoritaire. En effet, il incite à des alliances afin d'obtenir une majorité et condamne à l'échec les camps de droite ou de gauche qui n'y parviennent pas. Ainsi, les courants politiques tels que le centre et l'extrême-droite qui se refusent à toute alliance ou qui se voient exclus de toute alliance, soit condamnent leur camp à l'échec électoral, soit doivent se résigner à se retirer du second tour et renoncer à toute représentation.

     Cela peut conduire de plus, à la faveur de divisions à l'intérieur des deux camps, celui de droite et celui de gauche, au fait qu'une liste arrivée en rête mais n'ayant pas obtenu la majorité absolue des suffrages mais seulement une minorité plus ou moins importante de ces derniers se retouvent très largement majoritaire en sièges.

   Ainsi, si nous faisons un bilan rapide de ce mode de scrutin, il nous faut conclure qu'il n'est pas entièrement satisfaisant et qu'au mieux il permet , à l'intérieur d'un système intégralement de philosophie majoritaire, à garantir une représentation aux formations ayant participé à un second tour de scrutin.

  Ajoutons qu'il serait très complexe à mettre en place à un niveau national, c'est-à-dire à transposer au niveau des élections législatives. Or, la principale qualité d'un mode de scrutin doit être la simplicité afin d'être compris par tous et conduire à des résultats lisibles.

  Il nous faudra donc examiner s'il est possible de concevoir un tel mode de crutin, conciliant les inconciliables apparents, le principe majoritaire et le principe proportionnel, tout en garantissant une majorité politique qui ne soit pas excessivement amplifiée, en préservant la simplicité du système choisi. Ce sera l'objet de nos prochains billets en la matière.