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09.09.2025
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Rubrique "Cours: le savoir objectif". Suite du billet N°3398.
Extrait de Manuel de Philosophie, A/Mendiri, Amazon, 12 €
Prochain billet demain dimanche 19 juillet (Libres commentaires liturgiques)
Nous venons d’examiner en quoi consiste la démarche expérimentale et quelles sont les révolutions culturelles qui ont permis à la science rationnelle de naître et de se développer. Il ne faudrait pas s’imaginer cependant que l’activité scientifique est à l’abri des préjugés et des idéologies de son temps et surtout que cet état d’esprit est naturel chez tout un chacun. Il existe de multiples obstacles à la découverte et au développement du savoir scientifique, obstacles que Bachelard (XX° siècle) qualifie « d’épistémologiques », l’épistémologie étant dérivée du terme grec « épistémé » qui signifie connaissance. L’épistémologie est une réflexion critique sur les méthodes scientifiques, sur les possibilités et les limites de la science. C’est en fait la philosophie des sciences. Les « obstacles épistémologiques » doivent donc être entendus comme les obstacles à l’activité scientifique en général.
Le premier obstacle consiste à faire confiance de manière aveugle dans les organes des sens et à la perception en général. Pourtant, les exemples ne manquent pas qui apportent de cinglants démentis à cette croyance. Si je crois ce que je vois, il est clair que le soleil levant ou couchant se situe au bout du chemin. De même, je croirai que c’est le soleil qui tourne autour de la terre et non l’inverse car le Soleil se déplace dans le ciel du matin au soir alors que nous avons l’impression que la Terre est immobile. D’ailleurs, Ptolémée (II° siècle) a-t-il pu développer des connaissances astronomiques cohérentes sur la base de cette conviction, en permettant de confectionner des cartes du ciel exactes et qui servaient utilement à tous les navigateurs. Ce préjugé a traversé les siècles alors que dès le III° siècle av JC, Aristarque de Samos avait émis l’hypothèse et d’ailleurs établi à l’aide d’expériences simples, la rotation de la Terre sur elle-même et autour du Soleil. Arrêtons-nous à un dernier exemple : dans le désert, je peux être victime de mirages, avoir l’impression de percevoir plusieurs images de la même réalité, cela étant dû à des phénomènes optiques liés à la température différente de couches d’air superposées. Certes, les contemporains connaissent ces phénomènes et ne se laissent plus tromper.
Mais il n’en va pas de même pour d’autres phénomènes, très banals, comme la croyance spontanée que la couleur du vêtement que je perçois se situe sur ce vêtement et le caractérise. Or, cette couleur se situe dans mon œil. Pour saisir la pertinence du propos il est possible d’effectuer cette expérience simple : si je place la pointe d’un compas sur ma main, je ressentirai une légère sensation de piqûre. Il ne viendra à l’idée de personne que la sensation de piqûre est sur le compas. Pourtant, c’est très exactement ce que nous disons lorsque nous affirmons que la couleur est sur le vêtement, c’est-à-dire sur l’émetteur de la sensation et non sur le récepteur. Certes, l’émetteur, que ce soit le vêtement concerné ou le compas, joue un rôle. Si à la place du compas j’avais exercé une pression sur la main avec un objet à bout rond, je n’aurais pas eu de sensation de piqûre. De même, si j’avais appliqué mon compas sur la peau épaisse d’un rhinocéros, ce dernier n’aurait rien senti. Bref, la sensation est largement fonction des capacités de réception des organes des sens.
D’une manière générale nous avons tendance à oublier que notre perception est non seulement tributaire de notre savoir, de nos croyances, de nos états d’âme mais aussi de notre histoire et de nos habitudes. N’oublions pas que la perception de la profondeur par exemple et le résultat d’une construction. L’aveugle-né qui recouvre la vue perçoit tout sur le même plan. Il lui faudra du temps, pour que son cerveau synthétise les différentes informations provenant de la vue, du toucher, du mouvement de son corps en permettant immédiatement la perception de la profondeur.
De manière plus élaborée, nous venons de voir en quoi la connaissance scientifique n’était pas d’abord ni même essentiellement un affaire de perception, tant il est vrai que les faits que nous sommes à même de percevoir sont extrêmement limités et relatifs à ce qui est indispensable pour la vie pratique et pour l’adaptation à l’environnement. Bref, les organes des sens sont utiles à la vie ; l’erreur commence lorsque l’on veut les utiliser en vue de connaître le réel.
La perception habituelle peut nous conduire à des erreurs d’appréciation, à des conclusions erronées mais également la confiance que nous faisons spontanément dans le bon sens. C’est ainsi que le bon sens a empêché la découverte du principe même du mouvement pendant vingt-cinq siècles, alors même que ce principe est un des piliers de la science physique puisque celle-ci se définit précisément comme la science de la matière en mouvement.
Quel est ce principe ? Il s’agit du principe dit d’inertie. Pour en saisir le sens, imaginons une expérience simple : voici une voiture qui tombe en panne ; plusieurs personnes dévouées se proposent pour la pousser ; la route est plate ; malgré cela, la voiture ne redémarre pas ; fatiguées par leurs efforts, les personnes en question lâchent prise et la voiture continue quelques secondes à peine à rouler puis s’arrête. Pourquoi s’arrête-t-elle ? Le bon sens, avec Aristote d’ailleurs, répondra que c’est tout simplement parce que l’on s’est arrêté de la pousser. Or, c’est faux.
En effet, si la voiture ne continue pas à rouler alors qu’on s’est arrêté de la pousser c’est à cause des forces de frottement des roues sur la route et sur les essieux. Ces forces de frottement sont la source de « l’ inertie » du véhicule. Sans ces forces de frottement, la voiture prolongerait indéfiniment son mouvement. Galilée a imaginé, afin d’établir ce principe, un dispositif expérimental appelé « le plan incliné » sur lequel il fait rouler des billes d’acier de telle sorte que les forces de frottement soient quasiment neutralisées. Bref, afin de comprendre ce qui se passe dans la réalité, Galilée a dû inventer une situation artificielle qui ne se produit jamais dans la nature, à savoir une situation où il n’y a plus quasiment de forces de frottement. Le bon sens est bien loin. Mais la rigueur de cette expérimentation, allant à l’encontre du bon sens, a permis d’établir une des lois les plus importantes pour la science physique.
De même encore, des raisonnements cohérents, rigoureux, élaborés, mais coupés d’une expérimentation ont toutes les chances d’aboutir à des conclusions fausses. Ptolémée, que nous avons déjà cité à propos de la conception soutenant que le Soleil tournait autour de la Terre, défendait logiquement l’idée selon laquelle la Terre était immobile et qu’elle ne pouvait pas tourner sur elle-même, car si c’était le cas, tous les êtres se trouvant à sa surface en auraient été expulsés depuis longtemps à cause de la force centrifuge entraînée par ce mouvement de rotation de la Terre. Il prenait une toupie pour en faire la démonstration. Or, ce raisonnement plein de bon sens a été démenti par Huygens au XVII° siècle lorsqu’on a pu mesurer le rayon de la Terre. Ce rayon est tellement important par rapport aux êtres qui évoluent sur cette dernière que la force centrifuge en question s’avère quasiment nulle. En effet, elle se calcule selon la formule V2/ R ou V est la vitesse du mobile ou de l’être en question et R le rayon de la terre.
A.Mendiri